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mardi 30 décembre 2008

le carnet de voyage (1) - avril à septembre 2007

Semaine 1 – Malaisie – 2 mai 2007
Tout d’abord, désolé pour ceux ou celles qui ne sont pas tout à fait à l'aise avec le français : j'essaierai de donner des nouvelles en anglais ou en espagnol de temps en temps... Premier épisode des aventures dans le sud-est asiatique ! En Malaisie, donc.
Je ne m'attarde pas sur le voyage : vol low-cost un peu miteux vers Bahreïn, escale de 5... euh non, 6... euh non, 6 heures 30, dans un aéroport hallucinant : un mélange de luxe un peu trop clinquant (genre : "mes pétro-dollars sont plus gros que les tiens, fillette") et très très kitsch, les deux n'étant absolument pas incompatibles, bien au contraire ; avec des détails troublants dans le plus pur style je-ne-sais-pas-trop-qui-a-eu-l'idee-de-décorer-le-mur-derriere-cette-fontaine-de-champagne-avec-des-bambis-en-or-massif. Bien… Une petite bouteille d'eau tiède et une playstation3 (formula one en démo) m'ont tenu éveillé et le taux de change local du dollar m'a tenu le ventre vide... ah, oui! Seul gros avantage de la déco à la mode de Bahreïn : les abominables valises à roulettes qui pètent les oreilles et les nerfs (brolo-brolo-brolo-brolom) dans tous les aéroports et toutes les gares du monde sont ici réduits au silence par l'épaisse moquette grand luxe aux motifs imitation tapis d'orient (comme quoi contrairement au stupide adage gaulois et xénophobe, on peut avoir du pétrole ET des idées). Passons... Après avoir acheté un sublime et fort pratique rasoir électrique Remington A PILES (mon Dieu, pourquoi ne les a-t-on encore importés en Europe?) - qui a comblé tout a la fois mon besoin compulsif de consommation pour une petite quinzaine d'euros dans un pays où le luxe étale avec complaisance des prix qu'on confond trop facilement avec la date, et celui, moins futile, d'égaliser une barbe déjà envahissante - le trajet Bahreïn-Kuala Lumpur s'est bien passé entre somnolence et mauvais films, et l'arrivée en ville aussi. Mais j'y reviens tout de suite…
Pour l'instant, je suis a Kangar, dans la province du Perlis (extrême nord, tout près de la Thaïlande) où je suis venu pour escalader avec des potes d'Arnaud (Arnaud Anty, pour ceux qui le connaissent ; une grosse perte pour tous les autres) : Fang (un malais chinois qui me fait penser à un héros de Kitano, grand gamin hard core un peu désabusé), Arnaud qui est venu de Manille pour les 4 jours, et aussi Nina (une malaise musulmane, autoritaire et psycho-rigide, catégorie qui veut et doit absolument décider les horaires de lever, coucher et prise alimentaire de l’ensemble de la petite équipe pour se sentir en vie) et Olie (un allemand taillé dans le marbre de Marpessos, son petit ami secret, catégorie « mes parents ne doivent jamais l’apprendre mon amour, car même si tu es incroyablement beau et bien fait, tu n’es au fond qu’un vulgaire chien d’infidèle » - il vend des camions Mercedes-Benz en Malaisie), Mark (un anglais à l’accent de Bristol et au dos gris, quadragénaire pince-sans-rire très attachant, qui programme les feux de signalisation des trains en Malaisie) et Fieda (sa copine, une malaise chinoise, web designer, prof de yoga et adorable), Yann (un allemand peu bavard mais jovial qui construit des routes ou quelque chose comme ça), Sabina sa femme (est-allemande qui parlait allemand et russe mais avec qui on a bien déconné quand même, en langage international et en gesticulant) et leur fils de 5 ans, Till (qui grimpe aussi bien que nous tous, d'ailleurs, l’insupportable petit garnement). On s'est entassés à 7 dans la suite royale de l'hôtel de Kangar qui coûte environ... 50 euros la nuit (en tout et pour tout, avec 2 petits déjeuners inclus, qu'on a hésité à partager en 7 mais faut pas pousser quand même) et on a fait la queue pour les chiottes et la douche, dans une bonne humeur et une décontraction que je n'aurais pas crues possibles. Il fait plus de 30 degrés toute la journée, il pleut comme il pleuvait sur l'arche du vieux Noë environ 2h par jour, en général entre midi et 16 heures, en plein milieu des sessions de grimpe. Il faut donc ranger toutes les cordes à toute vitesse à ce moment-là, en courant, et attendre dans une grotte que ça s'arrête. Heureusement, les grottes ici c’est un peu comme les merdes de chiens sur les trottoirs de Toulouse et la roche sèche vite... et puis ça nous rafraîchit un peu.

Le site d'escalade est incroyable, comme les montagnes des encres de Chine chinoises (ou japonaises, je sais pas. Mais je trouvais rigolo d’écrire encres de Chine chinoises) : une énorme masse de calcaire sortie de nulle part au milieu des paddy-fields de riz et de la forêt, percée de toutes parts de grottes, cavernes, tunnels et boyaux qu'on traverse pour accéder aux différentes faces, avec des tas énormes de chiures de chauves-souris (extraites et compactées en briquettes, je suis sûr qu'on tient le combustible du 21ième siècle ; avis aux investisseurs audacieux) et de vieilles échelles de bois et de cordes pour arriver au pied des voies... la forêt pousse à toute vitesse, les champignons mesurent 60cm de haut et si on est pris de l'idée idiote d'arracher les arbustes qui poussent au pied des voies ou sur les chemins d'accès (ce que n'a pas manqué de faire l'allemand athlétique vendeur de Mercedes-Benz - il n'y a pas de germanophobie primaire dans mes propos, c'est un récit objectif - afin de nous constituer un petit camp de base propre et tiré au cordeau, en sifflotant le pont de la rivière Kwaï), on a les mains qui brûlent et qui cloquent pendant plusieurs heures. Hé hé hé. Il faut apprendre à lire les signes de la nature et éviter de toucher à ce qui a des poils, des taches de couleur vive et un latex visqueux à la surface (un moyen mnémotechnique facile : des poils, des taches de couleur vive et du latex, c’est comme un travesti techno à la Love Parade, et il ne vous viendrait pas à l’idée de toucher son costume. Bin les plantes en Asie, c’est pareil) : tout a un prix ici bas, et la sagesse aussi... Seul inconvénient du site : il y a de gros scolopendres rouges qui aiment prendre le soleil sur les rochers et le frais dans les prises où l'on met les doigts. Hum... ils sont dégueus mais gentils et pas (trop) urticants. On a fait de très belles voies sportives, des 5c de chauffe puis des 6a et 6b assez longues et élégantes. En tête, bien sûr. J’ai même fait en second, avec du sang et des larmes, et au détriment du style, les 2 tiers d'un 7a+ en dalle... hier matin, Fang s'est ouvert 2 doigts sur un bout de caillou qui s'est détaché de la paroi (seul autre défaut du site : les loose rocks, autrement dit, le calcaire est pourri et s'arrache facilement), et je me suis fait, sur un mouvement un peu bestial, une petite entorse du genou. Pom pom pom... on a donc calmé le jeu pour l'après-midi et je me suis offert un jour de relâche aujourd'hui, fête du travail pour les braves du monde entier. Puis mis en quête d'un ordi connecté à Internet. Si fait.
Côté culturel : la bouffe locale est incroyable (poissons frais mijotés au jus de fruit et épices, toutes sortes de soupes de nouilles, de ragoûts de nouilles, de plats de nouilles, un peu, beaucoup, passionnément épicés, de la cardamome fraîche (jamais essayé avant ; délicieux), légumes et fruits improbables, façon oeuf de dragon mais en plus bizarre, riz grillé avec toutes les garnitures possibles etc. en fait, chaque ethnie (Chinois, Malais et Indiens) a ses plats et ses recettes... mes coups de coeur pour l'instant : le roti canai, sorte de crêpe découpée en petits bout et servie avec différentes sauces pour tremper, le satay, petite brochette de poulet ou de boeuf, servie avec une sauce sucrée-salée aux cacahuètes pour tremper dedans, et le teh tarik, boisson phare des mamaks, les petits points de bouffe indiens musulmans : c'est du thé allongé au lait condensé, servi moussant et fumant. Super sucré, délicieux au début, écœurant à la fin mais incontournable! Tout ça se mange dans la rue, à toute heure ou presque et pour un prix qui reste très loin en-dessous de celui d'un espresso à Paname... Ceci dit, retour à KL : les couleurs sont magnifiques, l'architecture pour le moment, est indescriptible : une accumulation de vieux et décati, de quasi-bidonvilles, d'ultra design, tout à tour très asiatique, hindi surchargé en couleurs, musulman luxueux ou western-style un peu passé de mode. Ça donne l'impression d'un entassement erratique, à la limite du mauvais goût mais tout à fait réussi, entre des choses sans rapport. L’explication? Peut-être le fait que les 3 ethnies dominantes (musulmane "malaise originale", indienne et chinoise) se mélangent assez peu (pour ce que j'ai vu pour l'instant) et ont des modes de vie, des cultures et des coutumes assez différentes. Même les quartiers et les niveaux sociaux rappellent un peu les bonnes vieilles castes d'antan, si vous voyez ce que je veux dire. Re-hum... Ah oui ! Plus anecdotique mais bon : les gens ici n'ont jamais vu de cheveux frisés, on dirait. Et ça les fait beaucoup rire et sourire. Un gars m'a arrêté dans la rue pour demander si je l'avais fait faire ici ou en Europe avant de venir parce que ça coûte tellement cher ici de faire friser ses cheveux : je crois qu'il ne m'a tout simplement pas cru quand je lui ai répondu que c'était naturel. Eh eh eh. Voila, c'était pour le chapitre polissage d'ego a la main, j'ai fini. Autre déclinaison locale d'un thème asiatique fameux : les moustiques. Moins d'une semaine et je suis déjà couvert de piqûres. Faut dire que le pschit-pschit sent tellement mauvais et que la sensation sur la peau est tellement désagréable (collant et poisseux), et que les locaux s'en fichent tellement des moustiques (ils disent tous qu'il n'y a vraiment, vraiment pas de paludisme en Malaisie), que je ne suis déjà plus très scrupuleux... en plus, ils disent tous que le soja, très riche en vitamine B, les éloigne naturellement. Allons bon, manquait plus que cette vertu extraordinaire au soja : après le syndrome de féminisation, la gynécomastie, l'allongement de l'oestrus et la réduction de la spermatogenèse, voilà qu'il éloigne les moustiques. D’ici à ce qu'on vienne nous raconter qu'il permet en outre de constituer une sauce aigre et salée qui accommode merveilleusement tous les plats asiatiques...
Mon premier couchsurfer indien, Gurpreet, et son frère Khabir chez qui j’ai habité, étaient fantastiques et très rigolos, je les reverrai sans doute dans la semaine, et le reste s'organise peu a peu. Des nouvelles dès que j'en saurai plus. Voila pour l'instant : c'est tout et c'est déjà sans doute très long. Prenez soin de vous et à bientôt.

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