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mardi 30 décembre 2008

le carnet de voyage (5) - avril à septembre 2007

Semaine 5 – Malaisie-Thaïlande - mai 2007

Cinquième épisode sans doute un peu plus court (accès Internet difficile et hors de prix ici) et un peu plus ciblé que les précédents. Mes condoléances, donc, à ceux que l'escalade n'intéresse pas, mais alors pas du tout : je suis à Krabi, Thaïlande, c'est le paradis de l'escalade (et sans doute le paradis tout court), on est dedans toute la journée, je vais donc surtout parler... d'escalade.
Je ne m'attarde pas sur le voyage KL-Krabi : bus de nuit trop climatisé (mal à la gorge), queue à la frontière à la sortie de Malaisie vers 5h du mat' puis à l'entrée en Thaïlande vers 6h du mat', transfert à HatYai, où des tuk-tuks et moto-taxis te hurlent dessus pour te rançonner pour finalement ne pas te laisser là où tu voulais aller mais plutôt là où leur pote propose de te conduire pour plus long et plus cher… Le Thaï moyen doit être plus pauvre que le Malais moyen parce qu'il est plus aggressif, plus pugnace, plus prompt à te baiser et moins patient. Un premier contact plutôt tiède, du coup. Surtout après une nuit à tousser dans un bus trop froid. Arrivé à Krabi, je change encore de tuk-tuk et me retouve sur la plage, à attendre un hypothétique bateau : la course vers Railei et Tonsai (les plages des grimpeurs) coûte 600 baths. A toi de trouver des amis pour partager le bateau avec toi... Vers 14h, je suis enfin les pieds dans le sable de Tonsai Beach et plus rien n’existe et plus rien n'a d'importance et Dieu que c'est beau, ça dépasse l'entendement !

Total, je me trouve un chalet miteux et bon marché, pas en première ligne de plage, mais juste derrière, dans la jungle, je me débarrasse de mon gros sac et vais marchouiller et me baigner. Des paillotes plein la plage, des mecs avec des cordes et des baudriers sur l'épaule et surtout... les falaises et massifs calcaires les plus incroyables du monde. Les 2 premiers jours, je prends la température, me baigne, explore à pied, fais un peu de boulder sur la plage avec mes chaussons, discute avec tout le monde...
Je rencontre 2 gentilles israéliennes de 21 ans qui sont en vacances 2 mois entre leurs 2 années de service militaire et l'université. Rigolotes. Elles essaient de me faire gober que le shawarma est une spécialité israélienne (et nos amis les libanais, alors?), on passe une soirée agréable à un concert de reggae et puis elles partent le lendemain, en me disant qu'elles sont ravies de voir que tous les Français ne sont pas antisémites. Putain, qu'est-ce qu'ils ont tous avec ca, les Israéliens ? Ils en ont seulement jamais rencontré, des Francais... enfin bon, on s'échange les mails et mi casa es tu casa etc etc...

Il faut entrer dans le vif du sujet, maintenant que 2 jours ont passé. Tout autour de nous sur la plage, dans la jungle, en terrasse des bars, au large, au sud et au nord et partout : 200m d'à pics tout en collines, blocs et falaises. Et pleins de stalactites, de dévers et de toits, de fissures, de coulures, de tubes et de cheminées vertigineux, de bombés parfaits et de dalles lisses lisses lisses. C'est hallucinant comme le calcaire peut prendre, d'une section à la suivante, des aspects complètement différents : très lisse, très fracturé, granuleux, érodé ou en cire de bougie.
Du coup, la grimpe à Krabi est essentiellement déversante, souvent physique pour ne pas dire brutale, et quand les prises sont fines et les pas techniques, en général c'est tellement parcouru que c'est lisse et glissant comme du marbre... il faut donc se gagner les voies avec des pas type bloc qui sont pas donnés. Hé hé hé. C'est bien d'en chier aussi ! J'ai ouvert en tête des voies du 6a au 6b+ proprement. La plupart à vue, sauf quand les pas de blocs sont trop monstrueux et qu'il faut m'y reprendre à plusieurs fois. Et puis deux 6c+ mais alors, laborieuses, en perdant autant de litres de sueur que j'ai dépensé de kilos de magnésie ! Avis aux grimpeurs européens : on fait un convoi quand vous voulez pour y passer 2-3 semaines...

On rencontre facilement des gens avec qui grimper puisque 90% des gens sur Tonsai beach sont là pour l'escalade. De quelques jours à quelques mois, voire quelques années pour ceux qui n'arrivent plus à repartir. Je les comprends. On est tous un peu une famille, ensemble pour les p’tits déjs, puis en groupes pour grimper, puis ensemble vers 18h pour le coucher de soleil, à l'heure où les grimpeurs ordinaires sirotent un shake de fruits frais pendant que les sur-forts, tous muscles dehors, se font prendre en photo sur les 8b déversants sur fond de mer bleue-verte à quelques mètres au-dessus du bar... une des spécialités du coin, c'est le deep water soloing : des voies (dures) surplombant la mer, qu'on fait sans corde en se jetant à l'eau quand on a fini (non maman, rassure-toi je n'ai pas essayé !). J'ai grimpé essentiellement avec un petit québécois jeunot mais costaud, assez élégant quand il grimpe : Hugo, mignon et gentil, et un irlandais beau gosse barbu à cheveux longs, Kenny (le sosie de Sully dans Dr Quinn, femme médecin, pour les aficionados des séries pathétiques de M6. Mais si !! Le beau gosse avec un loup domestique...) qui vient de passer un an à travailler et bosser en Chine et Thaïlande. Il compte s'installer à Barcelone au retour en septembre, a des gouts musicaux plutôt intéressants et de la conversation. C'est rigolo ce que le monde est petit. Surtout que le lendemain, alors qu'on faisait la teuf avec un couple d'Australiens complètement allumés, j'ai croisé Xavi et Sonia, un couple de catalans de Santa Coloma (Barcelone). En congé sabbatique pour un an, ils sont à Krabi depuis 2 mois pour grimper, connaissent toutes les voies, tous les secteurs, tous les restaus et toutes les histoires de cul de toutes les serveuses, masseuses thaï, moniteurs d'escalade et autres locaux aux moeurs plutôt... légères. Je je je. Extraordinaires. Ce sont 2 habitués de la fuixarda et de Siurana en Catalogne, ils aiment bien la bouffe et le pinard, on rigole bien, et parler espagnol me fait un bien fou. Surtout quant on se dit que les shakes de pastèque et de mangue c'est bien joli mais qu'un peu de sobrassade avec du vieux fromage et des boquerones frais, ça serait quand même appréciable (ces deux-là promettent des gueuletons mémorables cet automne, après les week-ends d'escalade dans les Pyrénées...) ! J'ai donc passé le gros de ma semaine avec eux et Kenny et Hugo, entre roc et mer, à grimper toute la journée, à bouffer comme un roi et la perspective de partir après-demain me parait non seulement difficile à accepter mais en plus totalement saugrenue. Heureusement, après le dernier weekend à KL pour faire la fête et dire au revoir au climbing team, aux Sikhs et aux couchsurfers, je m'envole pour Bangkok où je retrouverai Mercè... déjà presque un mois et demi. Putain !

Côté culturel, la parenthèse sera culinaire et courte : du pad thai (nouilles grillées épicées aux légumes et à la citronnelle), le mango sticky rice, riz collant à la mangue tiède nappé de lait de coco salé. Bouleversant ! Et les incroyables shakes à tous les fruits possibles et imaginables. Plus toutes sortes de curries piquants et de soupes de riz. J'attends la fin des sessions d'escalade pour gouter au massage thaï traditionnel spécial grimpeurs. La culture locale s'arrête là. Des macaques débiles qui te volent tes bouteilles d'eau pendant que tu grimpes pour te les balancer sur la gueule 10 minutes après, des geckos volants qui ont l'habitude d'atterrir juste au coin de ton assiette de soupe de riz le matin, et des serpents que je me serais passé de rencontrer (les petites vipères arboricoles vert pétant, mais bon Dieu si elles sont arboicoles pourquoi est-ce qu'elles font la sieste sur le chemin de ma hutte? et un truc énorme facon python dont je n'ai vu, hereusement, que la tête et les 20 premiers centimètres)... il y a aussi quelques champs de cannabis arborescent entre le village et les falaises, entretenus et exploités par des hordes de reggaemen Thaïs - sosies de Bob en plus maigre et moins noir - qui racontent inlassablement la même vanne aux touristes "Hey Sir ! You know how Bob Marley he liked his donuts ? (...) - With jam in !" et ils se marrent pendant une heure en te montrant une bouche édentée, le mégot de ce qui a du être un 12feuilles ou un B52 coincé au bord des lèvres. Pour ceux qui ont un problème avec le calembour thaï anglophone, et souhaitent l'explication de la blague, je peux l'envoyer anonymement par sms sur simple demande...
Voilà pour la semaine à Krabi : l'Irlandais, le Québécois, les Israéliennes et le formidable couple de Catalans, j'ai passé des jours extraordinairement familiaux et conviviaux, cet endroit est magique, l'être humain n'est pas tout a fait foutu ni pourri et l'escalade est décidément un sport de dingues (j'adore). A la une du prochain numéro : dernier week-end malais, retrouvailles à Bangkok et Thaïlande en duo ! Peace.

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