
quelques idées, quelques images, beaucoup de mots, un peu de moi...

mardi 30 décembre 2008
le carnet de voyage (1) - avril à septembre 2007

le carnet de voyage (2) - avril à septembre 2007

Mais au bout d'un moment, l'île, ça allait bien. Le dimanche 6 mai sur le coup de 16h (donc environ 10 du mat’ en Europe), j'ai repris un bateau vers la terre, puis un taxi partagé avec 3 américaines hautaines et nunuches, pour aller m'entasser dans une backpackers' house de Kota Bahru, et me coller avec une soupe de nouilles devant Internet, élections obligent. 2 soeurs parisiennes (des soeurs de famille, pas des bonnes soeurs) sont venues se joindre à moi, on a bu du lait de soja et attendu en interrogeant Google, pour finalement trouver vers minuit, sur le site du Temps, journal suisse, les résultats d’un sondage non diffusable/non diffusé en France : réalisé jusqu'a 17h30 en sortie de bureaux de vote parisiens, il donnait 75% de suffrages exprimés, Sarkozy gagnant à 54% et une fiabilité supérieure à 95%. Donc on est allés se coucher, pour constater le lendemain que c'était bel et bien vrai. Je ne vais pas m'étaler, je respecte la décision de 54% d’entre nous, mais je ce que je pense depuis, c'est qu'un peu plus d'1 Français sur 2 est bête, méchant ou crédule. Et c'est possible qu'il y en ait qui cumulent crédulité, bêtise et méchanceté. Passons...
Le lundi, visite de Kota Bahru au ralenti : kapitale du batik, du cerf-volant et de la toupie sportive. J'ai donc visité des musées avec des cerfs-volants, des toupies de sport (comme les autres mais en plus gros) et des pièces de batik, quelques mannequins en cire et habillés de batik en train de lancer des toupies ou de découper des cerfs-volants etc... Et bien sûr, le musée des sultans de Kota Bahru, avec des pièces incroyables (mais vraies) comme le décapsuleur Mickey ramené de Floride au jeune sultan par son parrain en 1977, une maquette d'A380 offerte par Jacques Chirac au sultan en 2005 et la collection de chapeaux et de miniatures de fusils de guerre du sultan. La culture a un prix qui n'est pas à la portée de toute les bourses, je vous le dis... j'ai même assisté à une démonstration de toupie sportive d'endurance, dans laquelle deux équipes doivent faire tourner d'énormes toupies de bois et de métal (toupies de sport, donc) le plus longtemps possible. A l'aide d'une corde enduite de wax et passée autour du bras pour éviter les accidents, un homme surpuissant et très très vieux (c'est un art difficile, le lancer de toupies) les amorce. Une fois lancées, on les bloque sur un socle anti-frottement et on regarde, donc, laquelle tourne le plus longtemps, ce qui dure... 1h45 environ, pour les meilleurs joueurs. Ça, c’est du sport, madame. Ça vous fait des parties d'un rythme incroyable, avec des rebondissements inattendus, et face auxquelles le curling passerait presque pour un sport de combat à la violence et au suspense insoutenables.
le carnet de voyage (3) - avril à septembre 2007

le carnet de voyage (4) - avril à septembre 2007
Quatrième épisode : ça commence à sentir bon la saga. Promis je ne vous ferai ni dynastie ni les feux de l'amour, je n'ai que 4 mois. Menu du jour : Malaisie, suite et presque fin ! Pour épicer un peu la sauce et mettre un peu de nouveauté avant que la routine ne nous endorme, cette fois-ci j'annonce la couleur en préambule : 3 révélations au programme.
Pour ma dernière journée malakaise j'ai rencontré et été hébergé par une couchsurfeuse chinoise gentille, un peu barrée et complètement alcoolique, qui m'a forcé à boire du mauvais vin australien jusqu'à pas d'heure en me racontant ses histoires de coeur et ses problèmes avec les mecs... C'était rigolo. Comprendre délicieusement ambigu. Et pour ne pas compliquer sa vie déjà frappée du sceau du chaos affectif, j'ai dormi dans la chambre d'amis. Hé hé. Hum... la suite est rapide : j'ai pris un bus, attendu 3 heures dans une gare, pris un autre bus, roulé 14 heures, attendu sur un trottoir pendant 1 heure, pris une mobylette-taxi, attendu, pris un minibus incandescent pendant 4h et puis un taxi, puis attendu sur une jetée en plein soleil pour prendre un bateau-taxi... mais ça y est !! Je suis au paradis : Krabi, Thaïlande. Tonsai Beach, le plus bel endroit au monde après ceux, rares, qui sont plus beaux, et surtout, paradis de l'escalade... Pan ! Et la suite au prochain numéro ; voilà. On reste dans la tendance des précédents : c'est long, je m'étale. A ma décharge, faut reconnaître que pour moi, ça a gagné en intensité, humainement et spirituellement. En densité, aussi. Il fallait le temps de trouver le ton et le rythme... Ça a beau être collectif, je pense à vous tous ; enfin, "à chacun" serait plus exact, en fait. Des hugs et des bises.
le carnet de voyage (5) - avril à septembre 2007
Cinquième épisode sans doute un peu plus court (accès Internet difficile et hors de prix ici) et un peu plus ciblé que les précédents. Mes condoléances, donc, à ceux que l'escalade n'intéresse pas, mais alors pas du tout : je suis à Krabi, Thaïlande, c'est le paradis de l'escalade (et sans doute le paradis tout court), on est dedans toute la journée, je vais donc surtout parler... d'escalade.
Je ne m'attarde pas sur le voyage KL-Krabi : bus de nuit trop climatisé (mal à la gorge), queue à la frontière à la sortie de Malaisie vers 5h du mat' puis à l'entrée en Thaïlande vers 6h du mat', transfert à HatYai, où des tuk-tuks et moto-taxis te hurlent dessus pour te rançonner pour finalement ne pas te laisser là où tu voulais aller mais plutôt là où leur pote propose de te conduire pour plus long et plus cher… Le Thaï moyen doit être plus pauvre que le Malais moyen parce qu'il est plus aggressif, plus pugnace, plus prompt à te baiser et moins patient. Un premier contact plutôt tiède, du coup. Surtout après une nuit à tousser dans un bus trop froid. Arrivé à Krabi, je change encore de tuk-tuk et me retouve sur la plage, à attendre un hypothétique bateau : la course vers Railei et Tonsai (les plages des grimpeurs) coûte 600 baths. A toi de trouver des amis pour partager le bateau avec toi... Vers 14h, je suis enfin les pieds dans le sable de Tonsai Beach et plus rien n’existe et plus rien n'a d'importance et Dieu que c'est beau, ça dépasse l'entendement !
Je rencontre 2 gentilles israéliennes de 21 ans qui sont en vacances 2 mois entre leurs 2 années de service militaire et l'université. Rigolotes. Elles essaient de me faire gober que le shawarma est une spécialité israélienne (et nos amis les libanais, alors?), on passe une soirée agréable à un concert de reggae et puis elles partent le lendemain, en me disant qu'elles sont ravies de voir que tous les Français ne sont pas antisémites. Putain, qu'est-ce qu'ils ont tous avec ca, les Israéliens ? Ils en ont seulement jamais rencontré, des Francais... enfin bon, on s'échange les mails et mi casa es tu casa etc etc...
Il faut entrer dans le vif du sujet, maintenant que 2 jours ont passé. Tout autour de nous sur la plage, dans la jungle, en terrasse des bars, au large, au sud et au nord et partout : 200m d'à pics tout en collines, blocs et falaises. Et pleins de stalactites, de dévers et de toits, de fissures, de coulures, de tubes et de cheminées vertigineux, de bombés parfaits et de dalles lisses lisses lisses. C'est hallucinant comme le calcaire peut prendre, d'une section à la suivante, des aspects complètement différents : très lisse, très fracturé, granuleux, érodé ou en cire de bougie.
Du coup, la grimpe à Krabi est essentiellement déversante, souvent physique pour ne pas dire brutale, et quand les prises sont fines et les pas techniques, en général c'est tellement parcouru que c'est lisse et glissant comme du marbre... il faut donc se gagner les voies avec des pas type bloc qui sont pas donnés. Hé hé hé. C'est bien d'en chier aussi ! J'ai ouvert en tête des voies du 6a au 6b+ proprement. La plupart à vue, sauf quand les pas de blocs sont trop monstrueux et qu'il faut m'y reprendre à plusieurs fois. Et puis deux 6c+ mais alors, laborieuses, en perdant autant de litres de sueur que j'ai dépensé de kilos de magnésie ! Avis aux grimpeurs européens : on fait un convoi quand vous voulez pour y passer 2-3 semaines...
On rencontre facilement des gens avec qui grimper puisque 90% des gens sur Tonsai beach sont là pour l'escalade. De quelques jours à quelques mois, voire quelques années pour ceux qui n'arrivent plus à repartir. Je les comprends. On est tous un peu une famille, ensemble pour les p’tits déjs, puis en groupes pour grimper, puis ensemble vers 18h pour le coucher de soleil, à l'heure où les grimpeurs ordinaires sirotent un shake de fruits frais pendant que les sur-forts, tous muscles dehors, se font prendre en photo sur les 8b déversants sur fond de mer bleue-verte à quelques mètres au-dessus du bar... une des spécialités du coin, c'est le deep water soloing : des voies (dures) surplombant la mer, qu'on fait sans corde en se jetant à l'eau quand on a fini (non maman, rassure-toi je n'ai pas essayé !). J'ai grimpé essentiellement avec un petit québécois jeunot mais costaud, assez élégant quand il grimpe : Hugo, mignon et gentil, et un irlandais beau gosse barbu à cheveux longs, Kenny (le sosie de Sully dans Dr Quinn, femme médecin, pour les aficionados des séries pathétiques de M6. Mais si !! Le beau gosse avec un loup domestique...) qui vient de passer un an à travailler et bosser en Chine et Thaïlande. Il compte s'installer à Barcelone au retour en septembre, a des gouts musicaux plutôt intéressants et de la conversation. C'est rigolo ce que le monde est petit. Surtout que le lendemain, alors qu'on faisait la teuf avec un couple d'Australiens complètement allumés, j'ai croisé Xavi et Sonia, un couple de catalans de Santa Coloma (Barcelone). En congé sabbatique pour un an, ils sont à Krabi depuis 2 mois pour grimper, connaissent toutes les voies, tous les secteurs, tous les restaus et toutes les histoires de cul de toutes les serveuses, masseuses thaï, moniteurs d'escalade et autres locaux aux moeurs plutôt... légères. Je je je. Extraordinaires. Ce sont 2 habitués de la fuixarda et de Siurana en Catalogne, ils aiment bien la bouffe et le pinard, on rigole bien, et parler espagnol me fait un bien fou. Surtout quant on se dit que les shakes de pastèque et de mangue c'est bien joli mais qu'un peu de sobrassade avec du vieux fromage et des boquerones frais, ça serait quand même appréciable (ces deux-là promettent des gueuletons mémorables cet automne, après les week-ends d'escalade dans les Pyrénées...) ! J'ai donc passé le gros de ma semaine avec eux et Kenny et Hugo, entre roc et mer, à grimper toute la journée, à bouffer comme un roi et la perspective de partir après-demain me parait non seulement difficile à accepter mais en plus totalement saugrenue. Heureusement, après le dernier weekend à KL pour faire la fête et dire au revoir au climbing team, aux Sikhs et aux couchsurfers, je m'envole pour Bangkok où je retrouverai Mercè... déjà presque un mois et demi. Putain !
Côté culturel, la parenthèse sera culinaire et courte : du pad thai (nouilles grillées épicées aux légumes et à la citronnelle), le mango sticky rice, riz collant à la mangue tiède nappé de lait de coco salé. Bouleversant ! Et les incroyables shakes à tous les fruits possibles et imaginables. Plus toutes sortes de curries piquants et de soupes de riz. J'attends la fin des sessions d'escalade pour gouter au massage thaï traditionnel spécial grimpeurs.
le carnet de voyage (6) - avril à septembre 2007
Semaine 6 – Malaisie Thaïlande – 7 juin 2007
Sixième épisode, donc. Je m'étais arrêté un mercredi, sur le point de quitter Tonsai Beach, Krabi, Thailande. Et c'était le pied intégral : du soleil, la plage, l'escalade, des potes, des fruits frais et de la bouffe délicieuse ; le tout pour une poignée d'euros (même pas très grosse, la poignée). Comme la phrase précédente le laisse supposer, je ne suis pas parti le jeudi matin. Et ai "raté" le départ du vendredi... hum... pas envie de partir, pour être tout à fait honnête ;)
Les rites et cérémonies propitiatoires ont été intenses et émouvants : dire au revoir à tout le monde, faire mon sac, laisser ma hutte rustique et mes colocataires à poils, écailles et/ou cuticule, arroser copieusement la nuit du vendredi 1er juin (FULL MOON PAAAAAAAARTY), échanger les traditionnels emails pour pas se perdre de vue tout à fait etc... longue-queue bateau vers 9h le lendemain matin, de là un minibus pour HatYai (4h) puis l'attente dans une agence de voyages (3h) avant de monter dans un bus luxe et rouler vers KL (10h), en passant la frontière vers minuit et en arrivant en ville vers 5h du matin. Une sieste rapide et inoubliable - mes lombaires en tout cas s'en souviennent encore - sur la table basse du salon de ma guest house, la réception étant fermée...
le carnet de voyage (7) - avril à septembre 2007
Sawat Dee Krap ! septième épisode, et je tiens bon. J'espère que vous aussi. Le rythme est pris mais ça devient plus difficile de trouver le temps de me poser devant un ordinateur... Cette semaine a été folle. Pleine à ras bord. Débordante, trépidante. Belle.
Fin de journee, le soleil se couche sur un temple au nom imprononçable mais que la population locale appelle Temple on the hill. Pas particulièrement beau ni ancien ni rien, mais comme la lumiere descend sur le stupa doré (je sais pas ce qu'ils ont avec le doré en Thaïlande, mais ils aiment ça, c'est sur), on tombe sur un jeune israélien et un jeune moine bouddhiste en train de jouer au ping-pong sous le préau du temple. Le moine a été champion avant de se consacrer à des loisirs plus contemplatifs et moins terrestres. Il a de bons restes et le tournoi oechuménique (pardon papa, je ne sais toujours pas écrire ce mot) dans lequel on s'engage est sans pitié. Surtout que ledit moine - très boudhiste-joueur-de-go dans l'âme - ne dévoile de sa force que ce qui est nécessaire pour gagner mais pas trop, sans te mettre une branlée dans les règles. SangoKu, il pourrait s’appeler. On redescend du temple sur la colline avec la nuit, on mange très bien dans une gargotte thai et je me pose à Internet pendant que Mercè finit une aquarelle d'avant-hier... il fait frais... c'est le pied... je ferme les yeux une seconde et le flashback commence :
Après une journée fatigante vendredi dernier, à arpenter Bangkok pour partir sans regrets, on a pris le train de nuit pour ChiangMai, au nord, coeur culturel du pays et porte du triangle d'or : insurgés et francs-tireurs birmans, opium au kilo, femmes-girafes et sources chaudes. Les couchettes sont spatieuses mais sans compartiments : des alcôves le long du couloir avec un simple rideau, des ventilateurs dont les moteurs viennent des hélicoptères américains des années 60 et qui couvrent à peine le bruit du train, et des portes donnant sur la voie dont la porte a disparu... on dort étonnament bien et je me réveille vers 6h pour aller, de la porte ouverte sur la campagne thai, grimper à l'échelle et contempler le lever du soleil, le ruban du train et le panache de fumée de la loco diesel. Image de film et exotisme de bon ton, rizières et buffles, maisons sur pilotis, bambous et bananiers partout. Une heure magique.
On est à ChiangMai en début d'après-midi et on échoue dans une guest-house confortable ou on fait la connaissance de 2 américaines, 1 dominicaine (de République dominicaine, pas une soeur) et 1 tanzanienne qui voyagent ensemble. On loue un scooter pour visiter la ville, ses canaux, ses 300 temples, ses boutiques d'artisanat et ses marchés nocturnes. Délicieux, très agréable, calme et paisible. Des gens souriants, une ambiance détendue... On déjeune à la table d'un vieux monsieur thai qui suit des cours d'art boudhique à l'université de ChiangMai et nous parle de sa fille, médecin à Las Vegas. Il rigole parce qu'il connait Las Vegas et que nous, pas. On va voir un temple sur la colline, une cascade assez jolie, on découvre les joies du marchandage pour acheter des bracelets et des pantalons thai. Conclusion ? Il faut diviser par 3 puis lutter ferme pour remonter le moins possible. Si tu commences plus haut, tu te fais avoir. Enfin, on s'inscrit à une journée de cours de cuisine pour le lendemain.
Cours de cuisine simplement génial. Organisé, rodé et huilé pour les touristes, mais peu importe. On commence par le marché local pour découvrir et choisir les ingrédients : sauces et pâtes de curry, épices, herbes, légumes, fruits, viande. Quelle sauce de poisson ? Comment choisir la noix de coco ? A quoi sert la feuille de citron vert ? Je pose LA question qui me hante depuis des années : "comment on choisit les mangues?". Rire du guide-cuisinier, jeune, grand et dégingandé, gay jusqu'a la moëlle et incroyablement gentil et rigolo - son repertoire de vannes en Anglais est à la hauteur de celui de Paul Cabanié (avec tout le respect, Chef), ce n'est pas peu dire - "il faut demander au vendeur et si on a de la chance, lui il sait" ! Okay... de là, on file à l'école de cuisine, on a la démonstration puis on prépare chacun une soupe de poulet au lait de coco, on s'assied et on la mange. Délicieuse. On retourne en classe et on fait pareil avec des nouilles sautées au porc et aux légumes. On s'assied et on mange. Burps… délicieux. On fait pareil avec un curry rouge au poisson. On s'affale lourdement à table et on essaie de finir l'assiette. Sublime, vraiment. Puis vient un sauté de champignons sauce aigre-douce. On rampe jusqu'à la table et on trempe les baguettes dans l'assiette, on les porte poliment à la bouche avant de courir aux toilettes. Tout à fait succulent. Il est 14h, il fait une chaleur torride, on est pleins comme le slip d'un incontinent et il faut maintenant trouver le chemin de la salle de classe pour la démonstration de la papaya salad. On prépare chacun la sienne et on va la regarder dans les yeux, le ventre gonflé, inertes, dans la salle à manger. Vient ensuite le gateau de banane à la vapeur, sublime, et le sticky rice (du riz maintenant !!!!!) pour le dessert. En fait, je noircis le tableau pour rire: tout était vraiment délicieux, le cours agréable, on a appris plein de trucs, rencontré un couple de québécois très sympas, en voyage de noce, discuté un long moment avec notre prof thai (fan de ciné asiatique), on a compris et découvert comment faire de la nourriture différente avec des ingrédients somme toute pas si différents, et SURTOUT, on a bouffé comme des chancres pendant toute la journée ! Inoubliable.
Le soir même, lassés des scooters, on loue une vraie moto (Honda super four 400cc, en assez bon état) et on prépare un petit sac pour le lendemain. Direction Pai. Le trajet pour Pai est un vrai plaisir : une route sinueuse et bien entretenue, 140km de courbes serrées, de montées et de descentes qui rappellent le piémont ariégeois ou l'arrivée à Lacaune. Enfin, la jungle, les camions fous et les gens à 4 sur une mobylette en plus. La mise en garde du lonely planet s'avère vraie : "il y a en Thaïlande une troisième voie de circulation, invisible pour les non-thais, située au milieu de la route, et que tout un chacun peut utiliser à sa guise". Hum… On s'arrête pour manger dans un marché pittoresque à mi-route, on y reste une heure et demie jusqu'à ce que le déluge qui s'est abattu sur nous 5 minutes à peine après notre arrivée s'arrête, on attend que le torrent de boue couvrant la chaussée nous laisse apercevoir la roue avant de la moto, garée sur le bas-côté, et on repart pour le dernier tronçon. On cherche à soudoyer un garde forestier pour qu'il nous laisse aller voir un geyser sans payer les 400 bahts chacun pour l'entrée du parc naturel. En vain, il est inflexible. Tant pis, on en verra d'autres...
Pai est un village délicieux et hanté par le souvenir des hippies occidentaux qui l'ont tiré du néant et de l'oubli il y a une quarantaine d'années. Des bars musicaux qui fleurent bon le vieux jazz poussiéreux et le dreadlocks-ganja-reggae, des boutiques de livres d'occasion, toutes langues et tous genres confondus, des guest-houses qui proposent des "huttes rustiques dans les arbres avec vue sur la riviere pas cher" (comprendre sales et déjà occupées par des punaises, des geckos et des colonies de moustiques). J'avoue que la hutte dans l'arbre qu'on a visitée était trop roots pour moi. Et oui, qui l'eut cru ? On choisit, pour le meme prix - dérisoire - une hutte avec douche CHAUDE (3 semaines après la dernière, c'est un luxe que je goûte sans remords) dans un complexe tenu par le vieux et sympathique mister Jan, un herboriste chinois qui a planté là quelques huttes, un jardin médicinal dont les plantes et préparations sont mises gratuitement à la disposition du voyageur et un sauna gratuit. Seulement voilà: personne n'allume le feu du sauna le matin et les inondations de l'an dernier ont noyé le jardin botanique. Alors, publicité mensongère ? Nooooooon. Et pour le prouver, il offre à Mercè des bouts d'aloe vera machonnés par ses 10 chats, pour qu'elle oigne ses brûlures de friture du cours de cuisine de l'autre jour. Je constate avec soulagement que non, je ne suis pas jaloux : un vieil herboriste chinois peut oindre ma copine d'aloe vera sans que je me mette à bouillir !
Notre voisin est un catalan de Barcelone, pour changer. On discute un peu et puis on file s'inscrire pour une promenade en éléphant. Désolé. C'est un truc débile pour les touristes mais, oui. On en avait envie tous les 2 et faut pas bouder son plaisir... au retour, on prend la pluie sur la moto, on est morts de froid et de fatigue, j'ai la fièvre et une attaque de froid-maladie-désespoir irrationnel. Je dors 10 heures et tout s'arrange. Ce matin, donc, on part rencontrer notre éléphant. Une jeune fille de 47 ans étonnament fraiche et saine. On s'installe à cru sur son dos rapeux et on se balade, un sourire béat aux lèvres, dans la forêt environnante. Après une heure et demie, on pique droit sur la rivière, un marigot boueux et malsain gonflé par les pluies torrentielles de la veille et on le descend pendant un petit quart d'heure jusqu'à ce que, s'élargissant, le courant diminue et l'eau s'apaise. L'éléphante qui n'attendait que ça bascule sur le côté et nous fout à l'eau, puis s'étale dans le courant et nous douche avec sa trompe. Le guide, sur la berge, se bidonne en tirant sur sa pipe à opium puis nous oublie complètement, le regard dans le vide. On rigole un bon coup, on fait les cons avec l'éléphant qui trompe énormément et nous trempe énormément, puis quand il s'assied, on remonte sur son dos et hop! Il se plie en deux, nous refout à l'eau et le guide revient à lui pour recommencer à se foutre de nous, dans l'eau marron, sous la trompe-douche. On rigole un bon coup, on fait les cons avec l'éléphant qui trompe énormément et nous trempe énormément, puis quand il s'assied, on remonte sur son dos et hop! Il se plie en deux, nous refout à l'eau et le guide revient à lui pour recommencer à se foutre de nous, dans l'eau marron, sous la trompe-douche. On rigole un bon coup, on fait les cons avec l'éléphant qui trompe énormément et nous trempe énormément, puis quand il s'assied, on remonte sur son dos et hop! Il se plie en deux, nous refout à l'eau et le guide revient à lui pour recommencer à se foutre de nous, dans l'eau marron, sous la trompe-douche. Heureusement, à la 5ième fois, ça s'arrête, on rentre à la maison, où la patronne, hilare, nous offre un bain dans sa source chaude perso, qui coule derrière la hutte de l'éléphant qui trompe énormément. Après ça, on fait la tournée des temples du coin puis sur le coup de 3 heures, on s'écroule, morts de fatigues et puant l'eau souffrée de la souce chaude, dans notre hutte. On émerge vers 6 heures pour une douche et pour monter au temple sur la colline où nous attend le tournoi de ping-pomg oechumén... enfin, vous êtes déjà au courant.
La suite ? On explore la région demain à moto avant de retourner vers ChiangMai. De là, on ne sait pas trop mais on retrouve possiblement les 4 filles de la pension pour passer au Laos. On verra... Semaine énorme et qui est passée tellement vite. J’avais des a priori négatifs sur la Thaïlande (sexe, drogue, tourisme de masse etc.) et comme souvent avec les a priori, ils cachaient une réalité beaucoup plus complexe et nuancée. Jamais trop tard pour ouvrir les yeux, hein ? On vous embrasse tous, faites gaffe à vous et profitez de l'arrivée des beaux jours ! Peace.
le carnet de voyage (8) - avril à septembre 2007
Sabai Dii à tous ! (comme tous ici le disent à la moindre occasion, et à propos de n'importe quoi, le lao et le thaï, c'est same same... but different)
Huitième épisode : je glisse sans m'en rendre compte du deuxième au troisième mois de mes errances dans le sud-est asiatique... après 3 semaines, Mercè se porte comme un charme et - jusqu'ici - aucun parasite ni microbe poilu n'a eu raison de notre enthousiasme ! Je lis du mail de la semaine précédente quelque chose qui me laisse songeur : "cette semaine a été folle. Pleine a ras bord. Débordante, trépidante. Belle."... celui qui a écrit ça n'avait pas encore vécu cette huitième semaine, ne savait pas ce que c'est qu'une semaine folle. Pleine à ras bord. Débordante, trépidante. Belle. Moi je le sais, je viens d'en vivre une ! Je vous ai laissés à Pai, village hippie poussiéreux du nord de la Thaïlande, avec ma fière et puissante moto etc... juste après avoir posté le mail, on part pour Soppong avec la fière et puissante moto, qui, de virage en virage et de côte en côte, est de moins en moins fière et plus très puissante. En dessous de 5000 rpm, elle n'a rien à offrir et au dessus, pas grand-chose à part un bruit qui donne envie de pleurer et l'aiguille du thermo au grimpe en flèche. Quand elle cale finalement en première à 30 à l'heure dans une petite montée, on lâche l'affaire et penauds, la queue entre les jambes, on fait demi-tour et la lance dans la descente vers Pai... où aucun mécano ne veut y toucher (pas plus de 125cm3, Sahib, on sait pas faire). Le loueur de ChiangMai propose qu'on la lui ramène au plus vite et c'est ce qu'on fait. En 2 heures de temps, l'affaire est faite, les sacs bouclés et on a lancé la bête molle sur les 140km de virages serrés. A la vitesse où on roule, pas de danger !
En revanche, la saison des pluies fait une entrée impromptue et très remarquée dans l'après-midi et on doit faire des pauses de 40 minutes tous les 8 km pour s'abriter du déluge. Ça nous permet de faire le plein de lait de soja dans la gargotte de chaque village et de rencontrer un vieux, tellement vieux et tellement content de nous voir là, assis à sa table, qu'il commence à nous parler thai en souriant de toute sa bouche édentée. Il répète folong en montrant le ciel et en se marrant jusqu'à ce que (vous me pardonnerez la self-satisfaction) l'idée me vienne de prendre une feuille propre de mon moleskine pour lui dessiner, façon météo, un gros nuage joufflu, des cordes de pluie et un bonhomme trempé. J'écris "folong" à côté et lui tend le papier en disant folong. Il nous sourit comme jamais on ne m'a souri en 28 ans et se met à prendre papier et stylo pour dessiner une rue avec une moto, une maison et une table, le soleil, des voitures etc. et à énumerer et répéter le nom de chacune de toutes ces choses pour qu'on puisse le noter à côté. Chaque mot grignotte sur notre ignorance, nous rend tous les trois euphoriques et ça devient une sorte de pictionnary improvisé où on dessine chacun son tour un truc, qu'il doit reconnaître pour nous dire le nom : téléphone, bambou, camion (non David, on ne lui a pas fait pouet-pouet)... la pluie s'arrête et on repart, en lui laissant la moitié de cette brêche creusée dans la barrière des langues. Oui enfin bon, faut pas exagerer non plus :)
En vitesse : on arrive péniblement à ChiangMai avec la nuit, on décide de partir le lendemain matin pour Sukhothai et on boucle les sacs. Douche, padthai et mango sticky rice, nuit réparatrice et hop! 6 heures de bus escargot sous une chaleur harassante pour arriver, après avoir laissé les sacs à la guesthouse et loué un scooter, au complexe de temples avec le coucher du soleil. C'est comme une primo-injection pour Angkor Wat, la foule des touristes en moins : des bouddhas gigantesques dans un labyrinthe de ruines et de colonnes, de stupas et de bots en pierre sculptée, surchargés de frises et de gravures, tous plus vieux et rongés de pluie et magnifiques les uns que les autres. Malgré les quelques nuages, le ciel rose s'enflamme et se reflète sur les lacs couverts de lotus en fleur. C'est à pleurer. Comme on est perdus dans les kilomètres de piste du site, un gars nous prend dans son pick-up pour arriver au grand bouddha avec le dernier rayon de soleil et on rentre à pied avec la nuit. Quelques statues sont éclairées et on profite de la chaleur accumulée des pierres avec les chiens errants qui vivent là : les moines bouddhistes les nourrissent et les accueillent dans tous les temples par ici. Retour à la guesthouse, dîner décevant (le seul à ce jour) au marché local et coucher tôt pour un lever à 5 heures : tout dort à la ronde, on saute sur le scooter et on retourne au temple tout vaseux pour le lever du soleil. Les dalles de pierre sont toujours tièdes et les chiens toujours avachis, on aurait pu rester là avec eux, non ? Personne à la ronde jusqu'a 7h et demie mais des nuages qui nimbent l'horizon.
On saute ensuite dans un bus pour SriSatchnalai, autre complexe same same but different à une heure de là. Même topo pour le coucher du soleil, sauf que j'étais décidé à passer la nuit à la belle étoile sous la moustiquaire et que l'orage qui gronde nous fait entendre raison : on loue 2 vélos et une tente au bureau du parc et après une soupe de nouilles vite avalée on va s'allonger, crevés, sous la nuit et la pluie... Le lendemain matin, 5h, lever de soleil sur les bouddhas en ruines, Mercè peint un peu et on saute dans le bus de 7h40 pour filer vers la frontière lao. Encore une journee de bus surchauffé et escargotesque, dans des paysages de collines, de vallées, de rizières et de forêts hallucinants. On passe la nuit à ChiangKong, avec poulet coco, sticky rice, vue sur le Mékong et sur le Laos, inaccessible pour ce soir.
Nuit fraîche et lever matinal (serais-je en train de m'habituer ? pire, de prendre goût au réveil qui sonne à 5 heures du mat' ? tant que c'est pas pour aller bosser, au fond...) pour prendre un long-tail boat qui, au raz de l'eau boueuse et spumante (allez, on laisse passer celui-là), traverse mollement LE fleuve pour nous conduire au bureau de l'immigration. Ambiance austère et uniformes impeccables, visa payable en dolllllas et rubis sur l'ongle, on se fait tamponner le passeport et on entre comme en religion en république démocratique populaire lao. Mon premier (et l'un des tout derniers) pays communiste ! En plus, après un bref passage au bureau de change local je me trouve, pour moins de 50 euros, millionnaire en khips lao ! Hé hé hé. Ça s'arrose. Par un café local : après 2 mois de nescafé dégueu noyé de lait condensé, que j'avais fini par aimer, le robusta lao est un plaisir difficile à coucher par écrit. Ça sent, ça goûte, ça brûle un peu, ça se respire et ça amère tout la bouche. Petit déjeuner magique au bord du fleuve qu'on ne quittera plus pendant 20 heures. Enfin, c'est lui qui ne nous quittera plus. Le slowboat qui nous mène à Luang Prabang met 2 jours pour atteindre son port et on nous lâche à Pakbeng pour la nuit. Pension bon marché et sympathique, restau indien (orgie de naans), vendeurs d'opium et de ganja locale tous les 10 mètres, dans un village de huttes en bois et bambous autour d'une rue en terre dont l'éclairage s'éteint à 9heures et dont l'unique marché n'a jamais vu un contrôleur sanitaire. L'atmosphère est très différente de la Thaïlande pourtant proche : plus calme, plus reposée. Le lonely planet, qui dit quand même son lot de conneries, rapporte un proverbe à propos du Laos : "les Vietnamiens font pousser le riz, les Cambodgiens le regardent, mais les Laos l'écoutent". Et je vous promets que ça prend du sens dans un village comme celui-ci ! Tellement qu'on ne part pas le lendemain avec notre troupeau de co-touristes et qu'on s'offre un jour à écouter pousser le riz :) la vie locale change du tout au tout en dehors des heures d'arrivée-départ des bateaux. Chacun vaque, troque, vend bricole mais les falang (les occidentaux. Le mot peut être aussi bien affectueux que très péjoratif) ont disparu. Du coup, on nous parle et on est même invités pour une partie de pétanque. Un novice du temple du coin, Lai, nous fait la causette en anglais pendant une paire d'heures, nous explique son quotidien de novice et les 10 règles qu'il doit suivre. Facile par rapport aux moines qui en ont 227 ! On mange avec lui au temple et on part voir le fleuve, peindre un peu puis dîner chez un gars rencontré hier, qui parle français et dont le restaurant s'appelle "Mr Savalai restaurant : good lao food good conversation. Come try and you understand why i married my wife". sic. On mange du buffalo au lait de coco, je suis obligé d'arrêter de taper pour avaler les fils de salive qui coulent sur le clavier rien qu'à évoquer son buffle au lait de coco. Et autre chose aussi, dont je ne me souviens plus, délicieux pourtant, puis LE meilleur mango sticky rice du monde en dessert. Sachez qu'à mon retour en Europe, vous allez en bouffer du mango sticky rice, jusqu'à ce que je sache le faire aussi bon qu'ici !! En digestif on grignotte avec lui des bouts de champignons qu'il trempe dans des sortes d'herbes de provence hachées très fin et qu'il sort d'une poche en plastique douteuse. Ca le met dans un état de léthargie béate qui fait plaisir à voir, mais ou bien il a pris autre chose avant, ou bien on est réfractaires à cette drogue : ça ne nous fait rien du tout et on rentre à la guesthouse pour trouver nos voisins anglais attablés autour d'un joint qui sent la menthe, la coriandre et le jasmin : lao locale, de l'orfèvrerie, de la musique pour le poumon. Passons...
Une nuit paisible et un lever matinal, petit déj' au café local et beignets de bananes, slow boat pour une heure et demie, puisqu'au lieu de filer jusqu'a Luang Prabang direct, on a décidé de s'arrêter à TahSuang, petit village et porte d'entrée de la vallée de Hongsa. C'est l'émeute quand on descend du bateau ici : dans le coin, il n'en vient pas tous les jours, des falang (on a appris depuis que falang, en lao et en thai, c'est la patate, et on se marre avec Mercè, en criant pataaaaatas chaque fois qu'un lao hilare nous traite de falang et nous montre du doigt). On mange la soupe de nouille que nous sert la patronne de l'unique gargotte (une pour les 6 huttes), sans réelle envie et sans réel plaisir. Pas d'eau courante ici. L'électricité vient de petites turbines sur le cours de la rivière et il n'y a rien d'autre que de la poussière, des chiens et des enfants qui jouent avec une petite voiture. Putain, on dirait une chanson de Cabrel ce que je raconte ! On débarque vers 11h et on attend le "bus local", un pick-up avec deux planches en bois à l'arrière, qui doit partir à 13, euh non, 16, euh non, 17 heures. Je m'énerve un peu parce que les lao paient tous 10.000 kips pour le trajet et qu'il nous demande 30.000 chacun et puis, bon, on est de patates, c'est normal. 25km et une heure et demie plus tard, on a grimpé un sentier de terre défoncé d'ornières et de coulées de boue, qui serpente entre un flanc de montagne taillé à la dynamite et un à-pic dont je préfère ne pas parler pour ne pas risquer de m'en souvenir. On a passé un col et piqué sur une vallée de rizières, de bananiers et de bambous, cabanes en bambous sur pilotis, buffles paissant et soleil couchant. Hongsa.
Les locaux nous regardent bizarrement et murmurent falang en se marrant. On dirait qu'ils ont peur, des fois. Ou qu'ils regardent la télé. Fascinés, ils sont. Quand on sort les baguettes de notre sac pour manger la soupe de nouilles (impossible de se faire servir autre chose pendant les 2 jours, même quand on demande du khao, des maak khuay etc... (riz, bananes, rien d'extraordinaire pourtant), on se retrouve invariablement devant un grand bol de soupe de nouilles), quand on met du pschit pour les moustiques, quand on demande pour louer des vélos, quand on demande pour une brique de lait de soja... Quand on parle anglais, ils se marrent parce qu'ils ne comprennent pas. Quand on parle lao (enfin, quand on essaie), ils se marrent parce que des patates qui parlent lao, ça doit être une chose à peu près aussi drôle que Coluche qui fait le sketch du shimilii- du schimbiliiii- du schimib-. Il y a 16 voyelles dans l'alphabet lao et toutes pourraient se traduite par 'ao' ou 'ai'. Je vous laisse imaginer le résultat quand on demande "ola aubergiste ! aurais-tu l'amabilité de me faire goûter ta spécialité ? Et porte donc le picotin à mon vélo, il est fourbu". Si je tenais le demeuré qui a fait la page conversation du lonely planet, je lui ferais bien bouffer mes baguettes !
Après 2 jours de ça, et d'émerveillement permanent, et de vaines tentatives pour communiquer, on a pris ce matin le 'bus' en sens inverse. Cette fois-ci, on était 21 sur le plateau du pick-up avec plusieurs sacs de riz et des poules. Convivial. Intime. Et aussi effrayant qu'à l'aller. De là, on a sauté dans le slow boat et descendu le Mékong : un interminable et paresseux tapis de boue, de remous et de rapides mousseux, tendus entre des berges de jungle, de brulis, de huttes perdues, d'enfants maigres et de buffles ventrus qui se baignent, de couples improbables de lao brûlés par quelques heures d'attente sous le soleil de l'apres-midi, qui balancent un bras ou un bout de chemise sur le ciel pour que le bateau, mollement, vienne planter son nez dans le sable et les laisse monter. Ca dure des heures, les bancs en bois sont un supplice pour les fesses et la chaleur est infernale. Mais le paysage de plus en plus escarpé : de falaises et de villages, de soleil qui descend en affluents tourbillonneux... on vient d'arriver à Luang Prabang, deuxième ville du pays et premier contact avec une urbs lao pour nous. Ambiance coloniale et très paisible, soleil couchant, du français qui chante à tous les coins de rue et un mango shake glacé en descendant du bateau : j'aime la nature mais un petit brin de ville une fois par semaine, c'est appréciable.
La suite au prochain numéro... on vous embrasse tous, avec des pensées et des bises très spéciales pour la famille en ces jours de douleur et de recueillement. Vous nous manquez !